
L’approche de diffusion Paysan·ne Relais (PR)

L’agriculture malgache fait face à de nombreux défis, notamment la dégradation des sols et l’insécurité alimentaire. L’approche Paysan Relais (PR) permet de diffuser les pratiques agroécologiques par le biais d’agriculteurs formés, qui transmettent leurs connaissances à leurs pairs. Testée dans les régions d’Androy et de Boeny, cette approche a démontré son efficacité en facilitant l’adoption de techniques durables et adaptées aux réalités locales. En valorisant les savoirs paysans et en intégrant un système de certification nationale, le modèle PR renforce l’autonomie des communautés rurales tout en assurant la durabilité des pratiques agricoles. Il favorise l’accès aux formations, aux financements et aux activités génératrices de revenus pour les agriculteurs impliqués, tout en améliorant la résilience des systèmes agricoles.
Contexte
Challenges addressed
Environnementaux : La dégradation des sols, l’érosion hydrique et la variabilité des précipitations menacent la productivité agricole. L’adoption de techniques de conservation des sols est limitée par le manque de formation et d’accès aux ressources adaptées.
Sociaux : Les approches conventionnelles de diffusion agricole, souvent descendantes, peinent à s’ancrer durablement dans les pratiques locales. Le manque de reconnaissance institutionnelle des savoirs paysans entrave leur valorisation et transmission.
Économiques : L’accès limité aux intrants de qualité et aux financements restreint l’adoption des pratiques agroécologiques. De plus, l’absence d’un cadre réglementaire pour les PR rend difficile la pérennisation du modèle, freinant leur rôle dans le développement local.
Emplacement
Traiter
Summary of the process
L’approche PR repose sur trois piliers interconnectés : (1) le développement d’un système de conseil de proximité, où des PR formé·e·s transmettent leurs savoirs aux autres agriculteur·rice·s ; (2) la création de paquets techniques adaptés, enrichis par des évaluations participatives et régulièrement mis à jour pour répondre aux besoins locaux ; et (3) la mise en place d’un référentiel de formation et d’un cadre de certification, garantissant la reconnaissance institutionnelle des PR et leur accès à des financements. L’intégration de ces trois éléments permet d’assurer la diffusion efficace des pratiques agroécologiques et la durabilité du modèle PR, avec un impact direct sur l’amélioration des rendements agricoles et la résilience des communautés rurales face aux défis climatiques et économiques.
Building Blocks
Système de conseil de proximité
L’approche Paysan·ne Relais (PR) repose sur un système de conseil de proximité qui permet une transmission efficace des savoirs agroécologiques au sein des communautés rurales. Ce modèle se distingue par sa diffusion horizontale, où les PR, sélectionné·e·s sur la base de leur engagement et de leurs compétences, jouent un rôle clé en formant et accompagnant leurs pairs dans l’adoption de pratiques agricoles durables.
Les PR sont des agriculteur·rice·s locaux·ales qui appliquent des techniques agroécologiques sur leurs propres parcelles et servent de démonstrateurs pour les autres paysan·ne·s. Ils organisent des visites de terrain, des formations pratiques et des ateliers d’échange, facilitant ainsi l’apprentissage par l’expérience. Contrairement aux méthodes classiques de vulgarisation agricole, qui reposent souvent sur des expert·e·s extérieurs, l’approche PR permet une meilleure appropriation des connaissances et une adaptation plus fine aux réalités locales.
Le processus de mise en place des PR inclut plusieurs étapes :
- Sélection des PR
- Formation initiale
- Mise en pratique
- Accompagnement continu
Enabling factors
- Une formation continue, un accompagnement des ONG et des financements régionaux renforcent l’efficacité des PR. Leur acceptation sociale et leur proximité avec les communautés facilitent la diffusion et la pérennisation des techniques agroécologiques.
- Un processus de sélection basé sur des critères clairs tels que la motivation, l’acceptabilité sociale et les compétences en agroécologie permet d’identifier des relais efficaces.
Lesson learned
- L’adaptation locale des pratiques est essentielle. Les paysan·ne·s perçoivent certaines « bonnes pratiques » comme inapplicables. Le modèle PR, ancré dans les réalités locales, favorise une meilleure adoption des techniques.
- Un équilibre entre bénévolat et rémunération est nécessaire. Les PR doivent être indemnisé·e·s pour garantir leur engagement sans compromettre leur autonomie économique.
- Les spécificités de genre doivent être prises en compte. L’implication des « femmes leaders » permet d’adapter le modèle PR aux contraintes des agricultrices, assurant une diffusion plus inclusive des pratiques.
Resources
Constitution de paquets techniques
Les paquets techniques constituent un ensemble structuré de solutions agroécologiques adaptées aux défis spécifiques des régions d’Androy et de Boeny. Ils sont élaborés sur la base d’expériences de terrain, de recherches scientifiques et des savoirs empiriques des agriculteur·rice·s locaux·ales. Chaque paquet technique couvre un domaine clé de l’agriculture durable, notamment :
- Gestion et fertilité des sols : Techniques de conservation des sols, rotation des cultures, utilisation du compost et des engrais verts.
- Lutte contre l’érosion : Installation de haies vives, embocagement, plantation de cultures fixatrices d’azote.
- Agroforesterie : Association de cultures vivrières avec des arbres fruitiers et forestiers pour une meilleure résilience climatique.
- Adaptation au changement climatique : Sélection de variétés locales résistantes à la sécheresse, gestion optimisée de l’eau, agriculture de conservation.
Ces paquets techniques sont accompagnés de supports pédagogiques accessibles (guides illustrés, affiches, vidéos) et sont régulièrement mis à jour à travers des ateliers d’évaluation participative.
Enabling factors
- La participation active des paysan·ne·s et l’implication des ONG dans la formation et le suivi garantissent la pertinence des paquets techniques.
- Les ateliers d’évaluation réguliers et l’implication des acteurs étatiques favorisent l’apprentissage collectif et l’adoption à grande échelle.
Lesson learned
- Les paquets techniques favorisent l’adoption des pratiques agroécologiques en consolidant les savoirs locaux et en identifiant précisément les besoins des exploitations agricoles.
- L’adaptation des techniques au contexte local est essentielle. Certaines pratiques, comme la jachère ou le semis sous couvert, ne conviennent pas aux petit·e·s exploitant·e·s qui cultivent en continu.
- La prise en compte des contraintes foncières est indispensable. Les techniques nécessitant des investissements permanents, comme l’embocagement, ne sont pas viables pour les paysan·ne·s sans sécurisation foncière.
- Une approche flexible et différenciée est nécessaire. Les outils doivent être adaptés aux réalités des petit·e·s exploitant·e·s, des exploitations familiales et des grands producteur·rice·s.
- L’évaluation participative renforce l’efficacité des interventions. L’actualisation régulière des paquets techniques permet de mieux répondre aux besoins des bénéficiaires et d’améliorer leur impact.
Resources
Durabilité de l’approche PR
Pour garantir la pérennité du dispositif PR, il est essentiel d’assurer sa reconnaissance institutionnelle et son intégration dans les politiques agricoles nationales. Cela passe par la mise en place d’un référentiel national de formation et d’un système de certification des PR. Ce référentiel définit les compétences et les modules d’apprentissage nécessaires à la formation des PR, couvrant à la fois les aspects techniques (agroécologie, conservation des sols) et les compétences pédagogiques (animation, transmission des savoirs). La certification, en cours de développement, permettra aux PR d’accéder à des financements et de renforcer leur crédibilité auprès des institutions et partenaires agricoles. En parallèle, des mécanismes de financement ont été mis en place pour soutenir les PR et garantir leur autonomisation. Ces mécanismes incluent :
- Le Fonds Régional de Développement Agricole, qui subventionne les services fournis par les PR certifié·e·s.
- Les Activités Génératrices de Revenus (AGR), permettant aux PR de développer des services agricoles (vente de semences, production de compost) pour assurer leur viabilité économique.
- Des partenariats avec les organisations paysannes, afin d’intégrer les PR dans des structures locales de soutien agricole.
Enabling factors
- La mise en place d’un processus de certification, testé dans deux zones pilotes, garantit la reconnaissance officielle des PR et leur intégration dans les dispositifs agricoles.
- Le développement d’Activités Génératrices de Revenus (AGR) permet aux PR de proposer des services liés aux intrants locaux, renforçant ainsi leur autonomie financière.
- L’accès à des mécanismes de financement, notamment via le fonds régional de développement agricole, soutient les PR certifié·e·s en subventionnant leurs services et initiatives.
Lesson learned
- Un référentiel national et un processus de certification renforcent la légitimité et l’efficacité des PR. Ces outils offrent une reconnaissance officielle et facilitent leur inclusion dans les dispositifs de financement et les partenariats locaux.
- Le soutien à la création d’activités génératrices de revenus est crucial pour assurer l’engagement des PR à long terme. Des opportunités telles que la fourniture d’intrants permettent aux PR de concilier leurs responsabilités avec des bénéfices financiers directs.
- La collaboration avec les acteurs locaux est indispensable pour maintenir la durabilité du modèle après la fin des programmes. Ces partenariats garantissent une transition fluide et une continuité des services.
Impacts
Environnementaux :
- Augmentation de la biodiversité du sol et des services écosystémiques : l’application des pratiques agroécologiques permet aux sols une augmentation de leurs diversité biologique et un terrain favorable au maintien de services écosystémiques.
- Adaptation au changement climatique : les techniques agroécologiques amélioreront la résilience des systèmes agricoles.
Sociaux :
- Amélioration des connaissances agricoles : les PR transmettent des techniques agroécologiques adaptées, renforçant les compétences des agriculteur·rice·s.
- Création de réseaux locaux : les PR favorisent les échanges et la collaboration entre agriculteur·rice·s au niveau communal.
- Soutien aux femmes rurales : les « femmes leaders » intégrées au modèle renforcent l’autonomisation des femmes grâce à des solutions adaptées à leurs besoins spécifiques.
- Durabilité institutionnelle : les compétences des PR seront standardisées grâce à un processus de certification.
- Renforcement des réseaux institutionnels : la collaboration entre les ONG, le ministère et les partenaires locaux s’intensifie.
Économiques :
- Amélioration des revenus agricoles : les solutions durables proposées par les PR augmenteront la productivité et la rentabilité des exploitations agricoles.
- Dynamisation économique locale : le modèle favorise la création d’opportunités d’emploi et d’activités génératrices de revenus pour les PR.
Beneficiaries
- Les communautés rurales bénéficient directement des pratiques agroécologiques diffusées par les PR
- Les femmes agricultrices : Des « femmes leaders » sont formées pour favoriser l’inclusion des agricultrices
Global Biodiversity Framework (GBF)
Sustainable Development Goals
Story
Augustin est un agriculteur de la commune de Belalitra, engagé dans la préservation des terres agricoles face à l’érosion et à la perte de fertilité des sols. Avant de rejoindre le programme ProSol, il observait chaque année la dégradation de son environnement et la difficulté croissante à obtenir des récoltes suffisantes.
En devenant Paysan Relais (PR), il a bénéficié d’une formation approfondie sur la gestion durable des terres et l’agroécologie. Grâce à cet apprentissage, il a pu non seulement améliorer ses propres pratiques agricoles, mais aussi transmettre ses connaissances à d’autres paysan·ne·s de sa communauté.
« Au début, je me sentais un peu perdu, comme si je marchais dans l’inconnu. Nous ne savions même pas comment développer une pépinière, » raconte Augustin. Mais avec l’appui des technicien·ne·s du programme, il a appris des techniques adaptées et a commencé à animer des formations locales.
Un moment marquant de son parcours a été lorsqu’il a enseigné la greffe d’arbres fruitiers à un groupe d’agriculteur·rice·s. D’abord sceptiques, ces derniers ont progressivement gagné en confiance en voyant les résultats concrets. Aujourd’hui, ces nouvelles compétences se répandent dans la communauté, améliorant la résilience agricole et les revenus des familles.
Augustin a également su convaincre les plus réticents en leur proposant de tester progressivement les pratiques agroécologiques sur une petite parcelle. « Très souvent, ils revenaient vers moi, excités, pour partager leurs réussites, » se réjouit-il.
L’initiative « Dokany Mora ho an’ny Mpamokatra » a encore renforcé cet engouement, en facilitant l’accès aux formations et aux intrants agricoles. Aujourd’hui, Augustin est très sollicité pour partager son savoir, et il est fier de contribuer à la transformation de son territoire.
« Nous améliorons non seulement nos vies, mais aussi notre environnement, » conclut-il.